Programme de recherche

L’état de l’art rédigé dans le cadre de l’étude de faisabilité du PN ASIRI+ a mis en évidence un besoin de mener des actions de recherche pour différentes applications du renforcement des sols par inclusions rigides. A partir de ce constat, le programme de recherche du PN ASIRI+ a été élaboré autours de trois principaux axes :

Axe 1 : l’étude des plateformes de transfert de charge,
Axe 2 : le comportement des ouvrages sous sollicitations quasi-statiques et/ou inclinées,
Axe 3 : le comportement des ouvrages sous sollicitations dynamique et sismiques.

Le programme de recherche est organisé en 10 tâches.

Pilotée par Guillaume BOUSIRON (CEREMA) et Philippe DELMAS, cette tâche a pour objectif d’améliorer la compréhension des mécanismes dans les PTC. Des essais en vraie grandeur seront réalisés dans une des fosses du CEREMA de Rouen. Cette fosse de 30 m de long, 8 m de large et de 1 m de profondeur permet d’installer des inclusions rigides (IR) selon un maillage à taille réelle et de construire un remblai de 2 m de hauteur. Le sol compressible sera simulé par un bicouche constitué de mousse compressible et de BIOCOFRA permettant de simuler la compressibilité du sol pendant la montée du remblai et si besoin d’annuler la réaction du sol compressible en dissolvant la couche de BIOCOFRA. Quatre essais seront réalisés :

  • L’essai 1 permettra de comparer les mécanismes de transfert de charge dans la PTC granulaire sur un plot sans renforcement horizontal, un plot renforcé par géotextile et un plot renforcé par géogrille,
  • L’essai 2 sera réalisé pour étudier le comportement de la PTC granulaire renforcée sous le talus,
  • L’essai 3 permettra de comparer le comportement de deux PTC en sol traité mises en place sur des IR inscrites dans des mailles de tailles différentes,
  • L’essai 4 sera réalisé pour étudier le plan d’égal tassement dans le remblai, pour cela trois plots seront construits avec des remblais de différentes hauteurs.

Une instrumentation spécifique sera installée pour mesurer le tassement du sol compressible, le transfert de charge et la déformation des géosynthétiques.

Ces essais seront complétés par des expérimentations sur modèles réduits réalisées dans la centrifugeuse géotechnique de l’Université Gustave Eiffel. Le tassement du sol compressible est simulé avec le dispositif dit de « plateau mobile » (Blanc et al. 2013). Il sera ainsi possible d’étudier différentes configurations de recouvrement de renforcement géosynthétique (positionnement du recouvrement au droit ou entre des rangées d’IR), pour différents taux de recouvrement ou différentes hauteurs de PTC granulaire. Le cas du talus pourra aussi être abordé.

Pilotée par Rémi DELUZARCHE (EGIS), cette tâche a pour objectif de compléter l’approche expérimentale de la tâche 1 (obtenus avec un sol analogique) sur des cas réels. Trois ou quatre ouvrages sur IR seront instrumentés en fonction des opportunités offertes pendant la durée du projet. Le comportement sous talus sera particulièrement observé lors d’instrumentation d’ouvrages réels.

Pilotée par Thierry DUBREUCQ (Université Gustave Eiffel), cette tâche permettra d’analyser le comportement des PTC soumises à des chargements de circulation.

Un dispositif expérimental permettant de tester l’efficacité des nappes GSY de renforcement de plateformes granulaires soumises à des charges roulantes est disponible dans le laboratoire GEOMAS de l’INSA de Lyon. Les dimensions du banc d’essai (1,8 m de large, 5 m de long et 1,2 m de haut) permettent d’envisager de réaliser des essais de PTC sur IR à l’échelle 1. Un principe semblable à celui utilisé dans le plot expérimental de la tâche 1 sera mis en place avec un sol reconstitué (mélange de sable et d’argile). L’avantage de cette expérimentation en laboratoire est de pouvoir multiplier les configurations du renforcement de la PTC granulaire, du maillage des IR et d’appliquer des cycles de trafic. L’appareil permettant d’appliquer ce chargement est un Simulateur-Accélérateur de Trafic (SAT). Ce dispositif a été conçu et développé dans le cadre du LabCom PITAGOR de l’INSA de Lyon. Cet appareil simule un trafic uni ou bidirectionnel, sous une charge normale de 40 kN qui correspond à la charge d’un demi-essieu avec une contrainte au contact roue-surface de 566 kPa. Le SAT a été conçu pour offrir une longueur effective de roulement de deux mètres entre les zones tampons. Les structures routières non revêtues testées par ce dispositif sont soumises en général à 10 000 cycles, avec une profondeur maximale d’orniérage de 75 mm selon la FHWA (1998). La vitesse de circulation de la roue est fixée entre 7 et 10 km/h. Des essais de circulation au droit d’une file d’inclusions ou entre deux files pourront être menés ainsi que des essais de chargements verticaux. Les configurations testées dans le plot 1 de la tâche 1 seront testées sur cet appareillage afin de vérifier la cohérence des résultats et identifier les effets d’échelle, s’ils existent. Les essais réalisés dans la tâche 3 permettront de :

  • comparer l’efficacité de PTC renforcées ou non ;
  • déterminer le plan d’égal tassement ;
  • déterminer la configuration optimum du renforcement horizontal ;
  • comparer l’effet d’une charge cyclique verticale et une charge roulante ;
  • analyser les mécanismes de transfert de charge.

Par ailleurs, une étude paramétrique sera menée en centrifugeuse à l’aide du robot téléopérateur 4 axes (X,Y,Z, θx) pour prendre en compte les sollicitations de circulation. Cela nécessitera le développement d’un outil spécifique : une roue en modèle réduit, correspondant à une configuration typique d’un chargement roulant. Le modèle réduit sol-IR-remblai renforcé par GSY ou PTC en sol traité sera construit et instrumenté au préalable, avec des matériaux naturels ou analogiques. L’étude paramétrique portera sur la nature de la PTC, la présence ou non de GSY, le mouvement Aller, Aller-Retour, ou aléatoire dans le plan horizontal. Le cas du chargement hydraulique ultime de type inondation pourra être également abordé.

Pilotée par Cécilia BOHN (Keller) et Fabien Szymkiewicz (Université Gustave Eiffel), cette tâche a pour objectif de valider expérimentalement le comportement de semelles et de dallages sur IR avec ou non présence de PTC.

Le renforcement de semelle par IR sans PTC est une technique qui est proposée par certaines entreprises bien qu’elle n’entre pas dans le cadre des renforcements proposés par le PN ASIRI ; des cahiers des charges particuliers ont d’ailleurs été établis par ces entreprises pour diffuser cette technique. Afin de proposer une règle commune, il a été décidé de traiter ce cas spécifique dans le projet ASIRI+.

Trois semelles carrées seront disposées sur un maillage de quatre IR. La première semelle est directement posée dessus ; pour la deuxième, on installe un lit de sable de 5 cm d’épaisseur sur les IR ; pour la troisième, on dispose une PTC de 50 cm d’épaisseur. Les trois semelles seront soumises à des chargements verticaux centrés, excentrés et horizontaux. Des chargements horizontaux et verticaux combinés permettront de simuler des efforts inclinés sur la semelle. Cet essai traitera donc aussi des problèmes abordés dans la troisième partie de l’axe 1 (semelle sur IR) mais aussi à l’axe 2 (chargements inclinés).

Parallèlement à ces essais de chargement sur semelles, deux IR isolées seront chargées pour étudier leur comportement et deux dallages en béton fibré sur IR seront sollicités par différents cas de chargement (réparti, ponctuel, circulation). Un dallage sera directement construit sur les IR, pour le second, une PTC de 30 cm sera intercalée.

Ces essais seront complétés par une campagne expérimentale en centrifugeuse pour laquelle le dispositif pourra s’inspirer des essais déjà réalisés en centrifugeuse (Blanc et al. 2014) avec des inclusions rigides instrumentées en tête et rotulées en pied (en vue de chargements non verticaux).

Pilotée par Eric ANTOINET (Antea Group) et Jérome RACINAIS (Ménard), cette tâche est associée au projet FUI25 FEDRE.

Le renforcement des sols par IR est une méthode qui est en plein essor dans le domaine de l’éolien car elle permet de gommer les hétérogénéités du sol et de transférer les efforts vers des sols plus porteurs. Le sol de fondation est soumis à un chargement répété avec des concentrations de contrainte sous la partie de la semelle comprimée. Ces mécanismes de transfert de charge sont complexes et méritent des investigations spécifiques pour améliorer la connaissance et optimiser les renforcements de sol sous éolienne. Le projet FUI25 FEDRE qui a pour objectif de trouver des solutions innovantes pour la réutilisation des fondations d’éolienne lors des phases de « repowering », consacre un volet expérimental important à l’étude du comportement du sol renforcé par IR soumis aux sollicitations appliquées par l’éolienne. Les fondations d’une éolienne ont été instrumentées et les résultats concernant le renforcement de sol seront apportés au PN ASIRI+.

Pilotée par Donatienne Leparoux (Université Gustave Eiffel), la tâche 6 se focalise sur la propagation des ondes de surface dans un milieu à inclusions périodiques.

L’essor des réseaux de trains à haute vitesse dans le monde soulève de nouvelles problématiques de géotechnique, telle que celle de l’amplification des vibrations induites par une vitesse plus élevée des trains et ses conséquences sur la tenue de la structure ferroviaire elle-même. Une configuration singulière peut apparaître lorsque l’infrastructure ferroviaire traverse des terrains de faibles caractéristiques mécaniques et que la vitesse de circulation approche la vitesse critique de l’ensemble voie-terrain (Madshus et Kaynia 2000). La vitesse critique correspond à la vitesse de la charge mobile conduisant à une amplification de la réponse dynamique, provoquant un phénomène de résonance.

Aussi, la vitesse de propagation des ondes sismiques dans la structure « voie-sol » est un paramètre clé. Or, si celle-ci peut être évaluée dans des sols naturels, la question se pose sur la modification de sa valeur en présence d’IR.

Ainsi, la question posée ici est relative aux vitesses de propagation des ondes sismiques de surface dans des milieux hétérogènes structurés. L’application principale concerne la circulation de trains à grande vitesse sur des voies ferrées installées sur des remblais sur IR. Les IR installées dans le sol compressible « transforment », vu de loin, les propriétés du sol compressible, devenu un sol renforcé. Comment les vitesses de propagation des ondes (essentiellement les ondes de Rayleigh) sont-elles modifiées par la présence de ces inclusions ?

Si la géométrie a un caractère périodique dans l’axe longitudinal de la voie (des centaines d’IR dans cette direction), il n’en est rien dans le sens transversal. De plus des effets de bord, induisant des réflexions supplémentaires et complexes sont attendues.

Pour traiter cette question expérimentalement, il est proposé d’utiliser l’approche de modélisation physique de la propagation des ondes sur modèle réduit, à l’aide du dispositif expérimental de l’Université Gustave Eiffel MUSC (Mesure Ultrasonore Sans Contact). Le principe est de réduire les longueurs d’onde d’intérêt selon le même ratio que la taille du modèle réduit par rapport au prototype en vraie grandeur (Pageot et al. 2017).

De la sorte, une maquette pluri-décimétrique d’un sol renforcé par IR peut être mise à l’échelle, mais uniquement du point de vue des vitesses de propagation des ondes sismiques de surface, le contraste des vitesses d’ondes de Rayleigh entre IR et sol étant respecté. La sollicitation est appliquée en surface de la maquette (nature de la sollicitation à définir selon l’énergie), et les mesures, depuis la surface également, sont enregistrées sans contact par interférométrie laser.

Sur cette base, une étude expérimentale sur un modèle réduit constitué d’une résine (pour simuler le sol compressible) et de métal (pour les IR) peut être réalisée. La géométrie de la largeur du sol renforcé sous la voie ferrée peut être respectée, tandis que dans le sens longitudinal sera considérée une zone renforcée uniquement dans la partie centrale de la maquette, de telle sorte que cette zone renforcée puisse être considérée comme un élément « homogène », de propriétés différentes de celles des zones de « sol non renforcé » aux extrémités. Les paramètres concerneront :

  • maquette de « sol non renforcé » vs maquette de « sol renforcé » ;
  • plusieurs géométries de « sol renforcé », e.g faible α et fort α ;
  • maquette surmontée d’un élément de « remblai » pour étudier l’effet des terrains adjacents sur la propagation de l’énergie dans le modèle.

Les résultats expérimentaux permettront de caler des modèles numériques avancés de propagation des ondes de surface dans le matériau hétérogène qu’est le sol renforcé par IR verticales. Des ouvertures vers des techniques d’homogénéisation pourront également être entreprises.

Pilotée par Fernando Lopez-Caballero (Centrale Supélec), cette tâche se focalise sur les interactions cinématique et inertielle sous sollicitations sismiques (Fan et al., 1991).

Pour appliquer une sollicitation sismique contrôlée, le simulateur de séismes embarqué dans la centrifugeuse géotechnique de l’Ifsttar sera utilisé. Ce simulateur (Chazelas et al., 2008) permet de réaliser à échelle réduite des sollicitations horizontales unidirectionnelles (ondes VSH) mono-fréquentielles (sinus) ou multi-fréquentielles (séisme). Chaque modèle réduit sera instrumenté (accéléromètres, capteurs de pression interstitielle, déplacement sans contact, bender elements,…) et configuré de façon à pouvoir étudier : 1) le comportement en champ libre ; 2) la réponse du sol renforcé sans superstructure ; 3) la réponse du sol avec une superstructure (e.g. une fondation de bâtiment).

Des expérimentations de caractérisation des propriétés dynamiques des sols seront réalisées au laboratoire, afin d’identifier notamment la courbe de dégradation du module de déformation / cisaillement en fonction de la déformation : et la courbe d’amortissement en fonction de la déformation .

Les deux principales approches de modélisation numérique seront abordées :

  • L’analyse spectrale (domaine fréquentiel) ;
  • L’analyse temporelle non-linéaire.

Les méthodes de calcul numérique sont par ailleurs assez ouvertes : éléments finis, différences finies, macro-éléments (e.g. Li et al. 2016),… L’objectif est d’élaborer une série de modèles de référence permettant de couvrir, de façon séparée puis combinée, les principaux mécanismes mis en jeu sous séisme pour un ouvrage sur sol renforcé par inclusions rigides : effet fusible, interaction inertielle et interaction cinématique. Ces modèles devront être établis en lien avec les configurations testées en centrifugeuse, dans un objectif de validation d’une part, et de généralisation d’autre part (à des configurations plus complexes).

Pilotée par Pascal VILLARD (Université Grenoble-Alpes) et Daniel DIAS (Antea Group), cette tâche transversale a pour objectif d’évaluer les méthodes numériques usuelles et de les améliorer pour mieux simuler le comportement des renforcements de sol par IR.

La tâche 8 sera menée simultanément aux expérimentations en vraie grandeur et en laboratoire. Des calculs seront réalisés lors de benchmarks basés sur les résultats d’expérimentations menées en centrifugeuse ou in situ, en utilisant les modèles constitutifs existants. Ceux-ci auront comme objectif principal de tester les pratiques actuelles en matière de modélisation numérique et de définir les domaines de validité et la pertinence des modèles numériques testés. Ces modèles seront enrichis grâce aux résultats des expérimentations en vraie grandeur ou en modèle réduits puis appliqués à des configurations complexes. La facilité qu’ont les modèles numériques à envisager à moindre coût des études paramétriques détaillées permettra d’apporter un éclairage nouveau sur les mécanismes impliqués dans le renforcement et sur le rôle de chaque composant.

Deux types de modèles numériques seront envisagés pour en tester la pertinence et appréhender les mécanismes de transfert de charges dans la PTC. Les modèles continus, largement utilisés en ingénierie et la méthode des éléments discrets utilisée actuellement plutôt à des fins de recherche. L’apport de chaque modèle à la compréhension des mécanismes mis en jeu dans la PTC sera analysé via des études numériques comparatives. Un soin sera apporté pour préciser dans quelle mesure les modèles testés sont capables ou non de rendre compte de la complexité du problème (concentration des efforts au niveau de la tête de pieux entre autres). Plusieurs scénarii de chargement seront envisagés (charges ponctuelles verticales ou inclinées, charges réparties uniformes ou localisées).

Les sollicitations cycliques, dynamiques et sismiques (tâches 6 et 7) requièrent des modèles numériques avancés dont les paramètres sont complexes à définir ou à déterminer. Il s’agira de tester dans un premier temps les modèles disponibles sur le marché et d’en déterminer les performances.

Le renforcement des sols par IR est une technique associant différents éléments introduits dans le sol : les IR, la PTC renforcée ou non par des nappes horizontales. Cette technique peut être proposée en variante à des solutions moins vertueuses vis-à-vis de l’environnement. En effet, elle présente de nombreux avantages environnementaux tels que :

  • Une diminution des transports de matériaux par l’utilisation de tarières refoulantes ou vibrofoncées qui limite les quantités de sols à évacuer,
  • La participation du sol en place au renforcement de l’ouvrage qui diminue les volumes de béton à intégrer,
  • Un meilleur transfert de la charge appliquée par l’ouvrage qui limite les risques de tassement après construction de l’ouvrage et donc diminue les coûts de maintenance.

Un des objectifs du projet ASIRI+ sera de mettre en avant l’intérêt environnemental des solutions proposées.

La tâche 9 a pour objectif d’évaluer les aspects environnementaux liés à la solution de renforcement de sol par IR. Cette évaluation permettra de comparer les solutions techniques à partir de l’analyse du cycle de vie de chacune d’entre elles. Cette analyse comprend un inventaire du cycle de vie fournissant les données environnementales ; ces dernières permettent d’évaluer les impacts environnementaux de la solution de renforcement et de son utilisation durant sa vie en incluant les matières premières nécessaire à sa construction, sa mise en œuvre, son utilisation et son élimination.

Pilotée par Bruno SIMON (Président d’ASIRI+), Fahd CUIRA (SETEC) et Philippe GOTTELAND (FNTP), cette tâche a pour objectifs de transférer les résultats des recherches entreprises dans le projet ASIRI+ vers la pratique. Ce transfert se fera par la rédaction de recommandations, la publication d’articles scientifiques, la participation à des conférences nationales et internationales.

Le programme complet du projet est détaillé dans le rapport : téléchargez le rapport